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Ma vie selon... moi !
3 décembre 2012

5 ans...

[Femmes enceintes s'abstenir]

 

Il y a 5 ans jour pour jour que je suis devenue mère. Pourquoi cette date précise pour se remémorer autant de choses ? Peut-être parce que les jours sont identiques, je me rappelle tellement de ces jours....

 

Il y a 5 ans vendredi, j'entrais à la clinique pour stopper un début de travail. J'entamais ma 33e semaine. J'étais loin d'imaginer que j'allais être maman quatre jours plus tard... mon souvenir le plus marquant : les douloureuses piqûres de célestène dans les fesses pour maturer les poumons de notre petit. Arthur...Louis...on est toujours en pleine bataille pour le prénom.

 

Il y a 5 ans ce week-end, je me rappelle ces angoisses de voir ma grossesse se terminer précipitamment, cette solitude le soir quand Jérôme repart, ce produit en intraveineuse qui me génère des nausées violentes, ces monitorings qui deviennent rassurants au fil du temps.

 

Il y a 5 ans dimanche soir, je rentrais rassurée chez moi, le travail avait été calmé, mes paramètres étaient nickel, je pouvais rester à la maison, avec obligation d'un repos complet. Je me rappelle encore l'installation du canapé, cette perspective qui ne m'enchante guère de devoir rester allongée, il me faut tenir bon encore quelques semaines. Je suis à côté de mes pompes, je ne me rends pas trop compte de ce qui se joue, je subis la situation plus qu'autre chose. Je ne pense qu'à espérer te garder au chaud le plus longtemps possible.

 

Il y a 5 ans aujourd'hui, 4h du matin, je suis réveillée par une douleur lancinante du côté du foie. J'ai beaucoup d'acidité et je pense commencer peut-être un ulcère, ou que sais-je, je ne sais pas en fait. Heure après heure, la douleur augmente violemment, je ne tiens pas sur mes jambes, je dois vomir, mais je dois mettre un coussin entre mes jambes pour m'aider à tenir à genoux devant les wc tellement je suis épuisée par la douleur. Je me rappelle encore la métaphore que j'employais pour décrire ça : transpercée d'un poteau. L'impression d'un trou béant dans mon ventre. Jérôme est en panique, mes beaux-parents sont en panique, et moi je ne me rends pas compte de l'urgence, et je tente de rassurer tout le monde. Finalement, nous démarrons et à 9h je suis à la maternité. Je me tiens au comptoir pour ne pas tomber, affaiblie. On me perfuse une haute dose d'antalgiques, je respire un peu mieux, la douleur est toujours présente mais assourdie, lointaine. On enchaine les examens, échographie du foie, prises d'urines, ma tension est à 14 à l'arrivée. Une simple prise de sang et mon hématome vire en énorme bleu sur tout mon bras. On amène un tensiomètre électronique, et ma tension va commencer à être prise tous les X. Je ne comprends pas ce qu'il se passe, je ne sais pas trop. Mon gynécologue me garde dans un brouillard sciemment, il porte son masque très habituel de clown, il me fait rire, fait des blagues. Je suis dans un état cool. De l'autre côté, c'est autre chose qui se joue. Jérôme est mis au courant, dehors, on sait ce qu'il m'arrive, ce qu'il risque d'arriver, ce qu'on tente de faire. Moi, je suis chouchoutée, aux petits oignons, par moment, j'ai quatre infirmières autour de moi, à me cajoler, me caresser les mains, papoter avec moi.

 

Je ne comprends pas ce qui se joue. On me fait une échographie, j'apprends que le petit n'a plus pris de poids depuis 15 jours au moins, mais je ne mesure pas la portée de cette information. On commence à parler de possible césarienne, je commence à comprendre que tu vas me rejoindre peut-être plus vite que prévu mais ça ne tilte pas. Je continue de prendre mes urines qui finissent dans un pot pour un examen sur 24H.

 

Il n'est pas loin de 17h30, je pense, quand je me lève pour uriner de nouveau, et du sang coule franchement. On appelle les infirmières qui déboulent en 4e vitesse et le gynécologue peu après. Je perds pas mal de sang. Je ne sais pas pourquoi, en quoi ça consiste, d'où ça vient. Je suis ré-installée dans mon lit fissa, et mon gynécologue aura cette phrase qui m'a marquée : "Ma belle, ton p'tit il n'a plus à manger à l'intérieur, alors on va le sortir rapidement pour lui donner ses tartines dehors, ok ?". A ce moment, je suis ailleurs, j'ai l'impression d'être sérieuse, mais ma belle-mère m'avouera par la suite que de l'extérieur, je parais "loin", je suis euphorique, je deviens incohérente dans mes propos. On me prépare pour la césarienne.

 

Je me rappelle ce couloir, Jérôme à mes côtés, et puis ce passage de porte où on lui déclare qu'il ne peut pas aller au-delà. Je me tord pour l'apercevoir encore un peu. On me demande le prénom de notre fils, je lui dis qu'on sait pas encore, qu'on se dispute deux prénoms. Je crie dans le couloir après Jérôme "Comment on va l'appeler ???"...."Il s'appellera Arthur". C'était le prénom que j'avais choisi. Je vais me le ressasser dans la tête tout le long de ce temps.

 

Il y a 5 ans et pourtant je me souviens encore dans ma chair de toutes les sensations de ce moment si particulier. Je me rappelle le froid de la rachi qui s'engouffre dans mes jambes. Je me rappelle la première "découpe" et ma panique parce que je n'avais pas compris que je sentirai tout sans douleur. Je me rappelle avoir sommé l'anesthésiste de me donner la main, parce que je me sentais seule, derrière mon champ opératoire, les bras en croix. Je me rappelle sa gène devant ma demande, mais aussi la chaleur de sa main qui serrait la mienne très fort. Je me souviens encore de ton pleur mon Arthur. Et des mes larmes qui ont coulé sur mes joues, silencieuses. Je me rappelle de mon gyné qui passe la tête hors de la porte et qui crie : "Tout va bien, il gueule comme un putois !". Je me rappelle comme il me disait derrière son masque qu'il allait me refaire une jolie cicatrice, juste une griffe de chat, j'avais bien mérité ça après tout ce qu'on venait de vivre. Je me rappelle qu'il sifflait en me recousant.

 

Il y a 5 ans, à 18h50, tu naissais, arraché de moi à même pas 34 semaines, parce que vivre en moi était devenu plus dangereux qu'en dehors.

 

Je me rappelle ma nuit, je me rappelle le supplice du tensiomètre électronique qui ne me lâche pas d'une miette. Tous les 1/4h d'abord, puis toutes les 1/2h, enfin toutes les heures. Mes paramètres sont étonnamment bons si peu de temps après l'opération. Je ne dépasserai plus jamais les 12 de tension. Je me rappelle cette infirmière des soins intensifs, si douce, si prévenante, qui m'a beaucoup accompagnée. Je me rappelle Jérôme venant me voir, le parrain du petit qui avait forcé l'entrée. Je me rappelle un cliché de moi pour rassurer ma mère qui pleurait de ne pas m'avoir vue. Et puis je me rappelle te voir au travers de ce petit appareil photo, tu es tout fin, tu es plein de fils mais tu es vivant. Jérôme m'embrasse, me câline, me dit qu'il va bien, qu'il est bien vivant et en bonne santé.

 

Je me rappelle ma nuit, agitée, sans dormir une seule minute, nuit longue et insupportable, nuit d'attente, attente du matin pour te rencontrer, mon bébé, mon fils. Je me rappelle cette impatience, je la sens encore vibrer dans mes muscles, ces heures interminables loin de toi.

 

Il y aura 5 ans demain après-midi quand, enfin, je te rencontre. Je suis en fauteuil roulant, je ne peux pas courir jusqu'à toi, je dois puiser dans mes dernières limites de patience. On nous met en peau à peau, tu es si petit, si fin, tout maigrichon, je me souviens encore de cette sensation de ta peau contre ma peau, tu es tout chaud, tu es encore sous lampes chauffantes. Je n'ose pas bouger, à peine respirer, j'ai peur de te faire mal, de te casser en mille morceaux, tu sembles si fragile.

 

 

Tout a été à construire à partir de ce jour. Mais aujourd'hui, 5 ans après, la relation qui a éclos de toute cette expérience est riche, si riche, si intense, si forte. Mon petit, mon tout petit qui devient si grand, qu'il déborde de partout quand je le prends dans mes bras, mais qui arrive toujours à se recroqueviller, se faire tout petit pour tenir encore tout contre moi.

 

Je t'aime mon Arthur, toi qui m'a faite maman.

 

5 ans

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Commentaires
S
Oui, ça restera marqué à jamais, ça fait partie de notre histoire. Oui, un second petit garçon nous a rejoint, et cette fois sans souci !<br /> <br /> <br /> <br /> Sois la bienvenue chez moi ♥
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M
Bonjour, je viens de découvrir ton blog; Qu'elle épopée cet accouchement. Tu t'en souviendras toute ta vie, c'est sûr. Mais l'essentiel c'est qu'il est arrivé et bien arrivé;<br /> <br /> je vois que la famille s'est agrandie... je reviendrais te voir; Bonne journée.<br /> <br /> marie
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